Le départ d'Adèle
Rose s'apprêtait à monter dans le train en direction de Pépin de Résin quand elle entendit derrière elle la voix d'Henri.
-Adèle, je vous en supplie, je ne veux pas que vous partiez!
Rose s'arrêta et se retourna lentement en fermant les yeux. Henri haletant et désespéré glissa sa main dans la chevelure délicatement parfumée de la femme qu'il n'avait jamais autant aimée.
-Adèle, s'il vous plaît restez avec moi! murmura-t-il.
Rose ouvrit ses yeux couleur noisette, et constata avec soulagement qu'elle avait réussi à retenir ses larmes. Henri embrassa le cou de la jeune femme, elle frissonna.
-Laissez moi Henri, je vais finir par rater mon train...répondit la femme d'un air embarrassé.
Henri libéra le cou de sa bien-aimée et Rose s'empressa de monter sur le marche-pied lorsqu'une une voix retentit : "le train numéro 1479 en provenance de Cabernet Sauvignon et en direction de Pépin de Raisin va partir" la jeune femme disparu derrère la porte automatique et le train démarra.
Dans le train, Rose avait la place 17 dans le compartiment 184. Cela tombait bien, elle était née un 17 en 1984. Elle fut surprise de n'y voir aucun passager, ni même un contrôleur. La ligne était très peu fréquentée hors vacances scolaires. Après quelques heures à contempler le paysage défilant à vive allure, Rose entreprit de visiter les autres voitures du train dans l'espoir d'y trouver un Pépinien, un Francisquien, ou une même un clandestin. Secouée alternativement de gauche à droite pas la vitesse du train, Rose ouvrait unes à unes les portes des voiture avec toutes la force de ses bras. Après avoir traversé d'autres wagons aussi déserts que le sien l'unique voyageuse arriva soudain dans un wagon-restaurant. Il n'y avait personne, pas un bruit, juste le cliquetis des assiettes et des verres secoués par le roulement du train. Une pancarte indiquaient expressément qu'il était défendu de se pencher par les fenêtres sous peine d'amendes conformément aux dispositions du Code Pénal de la République de Pépin de Résin. Rose se demanda si c'était bien la loi Pépinoise qui devait s'appliquer dans un pareil cas mais ne réfléchit pas longtemps car elle avait très soif. Elle s'installa à la plus grande table près de la fenêtre et regarda autour d'elle. Décidément ce train lui faisait un peu penser à l'Orient Express dans Hercule Poirot. Sans doute les rideaux bordeaux assortis aux tapis ainsi que les couverts en argents disposés sur une nappe bordeau également y étaient pour quelquechose.
Arrivée à Pépin de Raisin après 3 jours de voyages en solitaire, Adèle se réjouissait de pouvoir enfin parler à quelqu'un.